Krach obligataire : déjà ?

“Après la Grèce, le Portugal… le scénario de contagion est en marche”, d’après Le Monde. Cela sent le roussi sur le marché obligataire. Si certains doutaient encore que la dette souveraine serait le problème majeur de 2011, cette nouvelle dégradation – et la baisse des marchés qui l’accompagne – devraient les convertir au krach obligataire.
Que s’est-il passé ces derniers jours ? L’agence de notation Fitch a dégradé la note de long terme du Portugal, qui passe ainsi de “AA” à “AA-”. Ce n’est pas vraiment une surprise, puisque le Portugal fait partie des fameux PIGS, ou PIIGS, ou Club Med qui sont sous le feu de la rampe depuis les ennuis grecs.
Les causes de cette dégradation ? Comme pour la Grèce, les déficits et la solvabilité du Portugal. Rien de bien original donc, mais un souci de plus de l’Europe qui n’arrive toujours pas vraiment à se décider sur l’aide à apporter à la Grèce. Plus les ennuis s’accumulent et plus l’incapacité de la zone euro à sauver l’un des siens devient évidente. L’euro est de nouveau le grand perdant puisqu’il repasse ce matin sous les 1,33 dollar, pour la première fois depuis 10 mois.
Dubaï, puis la Grèce et maintenant le Portugal… est-ce le début d’un effet boule de neige sur le marché obligataire ? En tout cas, la Fed avait, il y a quelques jours, publiquement exprimé ses inquiétudes. “La Fed craint que la crise grecque ‘affecte’ l’économie américaine”, titre Le Monde. Un de ses dirigeants, Dennis Lockhart, a identifié trois facteurs qui pourraient jouer sur la croissance économique américaine :
1. Baisse de la croissance en Europe et donc, par ricochet, baisse des exportations américaines vers le Vieux Continent.
2. Baisse de l’euro et par conséquent arrivée massive de capitaux sur le dollar, ce qui entraînerait une hausse importante du dollar et pénaliserait les exportations américaines.
3. Les ennuis grecs font boule de neige provoquant un désintérêt massif des investisseurs pour les obligations américaines. Voici ce que rapporte Le Monde : “Le troisième point est la possibilité que la crise budgétaire grecque débouche sur un grand choc des marchés financiers. Cela pourrait se manifester dans le système bancaire ou sous la forme d’un mouvement de retrait général [des investisseurs] du marché de la dette des Etats”.
Bon, pour tout dire, les deux premières craintes citées par Lockhart nous semblent être un bel écran de fumée destiné à masquer la véritable inquiétude des Américains : le troisième point.
Les Etats-Unis sont une énorme machine à dépenser (2 000 milliards de dollars devront être empruntés cette année) et ont donc des besoins sans fin de financement…
La question de la réduction des déficits devient de plus en plus cruciale. Pour stabiliser leur endettement, les Etats vont devoir faire d’énormes efforts. Le graphe ci-dessous représente le surcroît d’impôts et de taxes que les Etats vont devoir accepter de mettre en place pour faire revenir leur endettement au niveau de 2007, soit avant-crise.

Ainsi, les Etats-Unis devront accroître leur pression fiscale de 8% pendant cinq ans, la France de 7,5% et l’Irlande de presque 12% !
Le problème, comme le signalait l’économiste Nouriel Roubini dans une tribune publiée par Les Echos, c’est que la réduction drastique des déficits est une opération dangereuse. Roubini rappelle l’exemple de l’Argentine dans les années 1998-2001 qui, par sa politique de rigueur budgétaire, a durablement plombé sa croissance : “Le dilemme est le suivant. D’un côté, la réduction des déficits budgétaires est une nécessité pour éviter une augmentation hors de contrôle des taux d’intérêt sur la dette souveraine. De l’autre, à court terme, une augmentation des impôts et une diminution des dépenses publiques pèsent sur la croissance. Ce qui empêche le retour à un niveau tenable de l’endettement public. Ce fut en effet le piège dans lequel l’Argentine est tombée en 1998-2001, lorsque la réduction nécessaire du déficit a exacerbé la récession et a finalement entraîné le défaut de paiement”.
Et pourtant, la réduction de la dette est indispensable pour éviter de crouler sous le poids du remboursement des taux d’intérêt. C’est ce que vous explique plus en détail Eberhardt Unger dans son article sur le remboursement de la dette. En 2040, pour la France, le paiement des intérêts devrait représenter presque 20% du PIB…
Les Etats se trouvent donc devant un choix difficile, réduire suffisamment le déficit pour ne plus risque le défaut de paiement et le krach obligataire, mais sans que les effets négatifs sur la croissance se fassent ressentir. Une opération d’autant plus difficile que les Etats ont tendance à fonder leurs prévisions et leurs projections sur des chiffres faussés, pour ne pas dire complètement imaginaires. Nous vous en parlions vendredi dernier dans la Quotidienne, les prévisions de croissance fournie par l’Etat français à la Commission européenne ont été jugés complètement fantaisistes.
Qu’en conclure ? Premièrement, que le transfert des dettes privées vers le secteur public a créé une situation explosive et incontrôlable. Et que deuxièmement, malgré les moult engagements de Nicolas Sarkozy à ce sujet, l’augmentation de la pression fiscale nous semble plus que probable.
http://www.moneyweek

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2 Réponses to “Krach obligataire : déjà ?”

  1. Pacalvotan Says:

    Salut Fonzi,
    On y est! Si les massmedias en parlent enfin…Quand est-ce que tu publies des conseils pour avoir la main verte niveau potager?

  2. mebarak Says:

    Quand est ce que ces imbéciles de médias continentaux reprennent les basses infos des journaux anglo saxons dont le seul but est de décrédibiliser la zone euro. Afin d’éviter de regarder chez eux, pour info la situation de la Californie est bien pire et pèse bien plus lourd pour les Usa que la Grèce pour l’UE.
    Ce tropisme anglo saxon de la part de nos «  » » » »élites » » » » » » » nous tuera.

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